Vers le savoir libre : Un plan d’action canadien pour 2025 pour les bibliothèques de recherches et les bibliothèques universitaires est aussi disponible en format PDF.
Introduction et contexte¹
Au cours des dernières années, il y a eu un certain nombre de développements importants dans le paysage du savoir libre² - tant au Canada que dans le monde entier - qui justifient de revoir les approches stratégiques de l’ABRC et du RCDR et de réaffirmer le rôle des bibliothèques de recherche et des bibliothèques universitaires au Canada.³ Ces développements comprennent :
- Des politiques de savoir libre nettement plus fortes en Europe (déclaration du Conseil de l'Union européenne en faveur de Publication universitaire de qualité, transparente, ouverte, fiable et équitable en mai 2023, un suivi robuste à la publication du Plan S en 2018) et aux États-Unis (Mémo Nelson de l’OSTP publié en août 2022), des politiques qui suppriment la période d’embargo pour la mise à la disposition des articles et, dans certains cas, obligent également les chercheuses et chercheurs à conserver leurs droits d’auteurs (le FRQ se joint au Plan S en juin 2021).
- Un soutien unanime des pays membres de l’UNESCO en novembre 2021 pour la recommandation de l’UNESCO sur une science ouverte qui fournit un cadre pour les politiques nationales pour la science ouverte, axées sur l’inclusivité.
- Les activités de réforme de l’évaluation de la recherche dans plusieurs pays, dont la Coalition for Advancing Research Assessment (CoARA), une coalition mondiale d’organisations de financement de recherche, d’organisations de recherche, d’autorités d’évaluation nationales/régionales et des agences qui prévoient de réduire l’importance des mesures basées sur les publications pour évaluer le rendement en matière de recherche.
- La négociation fructueuse de plusieurs accords de style lecture et publication à coût neutre au sein du RCDR qui ont permis d'étendre le libre accès au contenu rédigé par des auteurs canadiens auprès de ces éditeurs.
- Un soutien coordonné à l’infrastructure canadienne de l’édition (par exemple, Coalition Publica).
- Le lancement de l’Alliance de recherche numérique du Canada en 2019 avec une augmentation importante au soutien national à la gestion des données de recherche.
- La reconnaissance croissante de l’importance de la diversité, de l’équité et de l’inclusion dans la recherche, l’enseignement et les communications savantes et la nécessité de lutter contre les inégalités mondiales dans le système.
- L’annonce par cOAlition S qu'ils cesseront le soutien financier de la publication en libre accès dans le cadre des accords transformatifs après 2024, à quelques exceptions.
- Le succès du partage rapide et ouvert des résultats de la recherche lors de la pandémie de la COVID-19 en 2019-2020.
- L’adoption de la Politique des trois organismes sur la gestion des données de recherche en 2021 qui oblige les chercheuses et chercheurs de préparer des plans de gestion des données et que chaque établissement postsecondaire de recherche de créer une stratégie institutionnelle de gestion des données de recherche (GDR) d’ici le 1er mars 2023.
- Adoption de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones au Canada en 2021.
- La publication de la Feuille de route pour la science ouverte par le Bureau du conseiller scientifique en chef en 2020 présente des recommandations pour rendre les résultats scientifiques et de recherche financés par le gouvernement fédéral librement accessibles.
- L’établissement de deux consortiums nationaux (ORCID-CA et DataCite Canada) pour faire progresser l’adoption d’identifiants pérennes, en améliorant la capacité de découverte et le suivi des résultats de recherche au Canada.
Objectif commun
Les bibliothèques de recherche et les bibliothèques universitaires au Canada cherchent à transformer le système de recherche et de communication savante en un système basé sur le savoir libre. Cette orientation favorise un accès mondial opportun, équitable et durable à la connaissance et à sa diffusion, et accroît les contributions de la recherche canadienne au progrès de la science, de l’érudition, de la bibliodiversité et à l’amélioration de la société.
À ce titre, les bibliothèques universitaires et bibliothèques de recherche au Canada s’engagent à assurer un accès immédiat et sans entrave aux résultats de la recherche savante canadienne (qu’il s’agisse de données, de préimpressions, de travaux publiés, de logiciels ou autres résultats) par l’intermédiaire de :
- Poursuivre une stratégie à plusieurs volets pour parvenir à l'équilibre et à la durabilité au sein du système de recherche et de communication savantes, en reconnaissant la valeur apportée par les différentes parties prenantes et les diverses voies vers la science ouverte.
- Investir dans une infrastructure ouverte gérée par la communauté tant au Canada qu’à l’international.
- Promouvoir l’adoption de métadonnées de qualité et d’identifiants pérennes pour les résultats de la recherche, et l’adoption des principes FAIR (« findable, accessible, interoperable, reusable »), pour soutenir l’intégrité de la recherche et la découverte, l’accès et l’utilisation à long terme.
- Respecter et protéger les données indigènes en consultation avec les communautés, en tenant compte des principes CARE (« collective benefit, authority to control, responsibility, ethics ») et des principes de propriété, de contrôle, d'accès et de possession (OCAP) des Premières Nations.
- Soutenir les publications de la langue française.
- Favoriser le multilinguisme dans les communications savantes.
- Assurer la préservation à long terme du patrimoine culturel canadien et des résultats de la recherche grâce à des efforts collaboratifs, intentionnels, abordables et soutenus axés sur l’inclusivité, l’ouverture et la transparence, les partenariats communautaires, ainsi que le renforcement des capacités.
- Renforcer les capacités techniques et d’expertise et soutenir les communautés de pratique afin de développer l’intendance et la préservation des résultats de la recherche canadienne.
- S’efforcer de faire progresser et de promouvoir la recherche et l’érudition canadiennes grâce à une harmonisation stratégique et à la collaboration à l’échelle nationale et internationale.
- Contribuer à l'excellence et à la qualité de la recherche en soutenant l'adoption de pratiques scientifiques ouvertes qui renforcent l'intégrité, la fiabilité et la transparence du processus de recherche.
Vision
Notre vision est celle où l’ensemble des membres de la communauté de la recherche ont accès à l'éventail le plus large possible aux résultats de recherche de confiance qui respectent les principes de FAIR et de CARE, sont librement disponibles et activement préservés à long terme et ont aucuns frais d’accès ni frais de publication. Dans ce système mondial, le Canada dispose d’une infrastructure nationale solide pour les communications savantes et la recherche canadienne est très visible. Collectivement, les bibliothèques universitaires et les bibliothèques de recherche canadiennes forment une communauté de parties prenantes clés qui jouent un rôle important et essentiel dans l’écosystème national et international en partageant leur expertise, en gérant des services institutionnels et en apportant un soutien aux infrastructures et services ouverts régionaux, nationaux et internationaux.
Plan d’action commun
Pour faire progresser cette vision, la communauté des bibliothèques de recherche et des bibliothèques universitaires, en collaboration avec des principales parties prenantes, entreprendra les activités prioritaires suivantes au cours des deux prochaines années et au-delà.
1. Diffuser et préserver les résultats de la recherche canadienne
- Renforcer le réseau canadien de dépôts institutionnels (DI) notamment en poursuivant la mise en place d’une plateforme de DI partagée avec une adhésion facultative et d’une communauté de pratique renouvelée. (Responsabilité : ABRC)
- Soutenir les initiatives canadiennes en matière d’édition et tirer parti des approches collectives (par exemple, Coalition Publica, revues locales). (Co-responsabilité : RCDR et ABRC)
- Réorienter les coûts d'abonnement pour financer la publication en libre accès de contenus d'auteurs canadiens de manière durable et en accord avec les valeurs des bibliothèques universitaires et de recherche. (Responsabilité : RCDR)
- Collaborer à l’élaboration de solutions pour l’accès perpétuel aux contenus sous licence (par exemple, le service national de dépôt numérique fiable pour les revues de Scholars Portal). (Responsabilité : RCDR avec OCUL)
- Améliorer les collections et l’infrastructure de Canadiana afin de soutenir les chercheuses et chercheurs canadiens et de faciliter la croissance du contenu à grande échelle. (Responsabilité : RCDR)
- Recueillir et fournir l’accès aux données de recherche canadiennes par l’intermédiaire de Borealis, du DFDR ou d’autres dépôts de données appropriés. (Co-responsabilité : Alliance et les consortiums régionaux avec le soutien de l’ABRC)
- Renforcer la relation entre la préservation numérique et le savoir libre grâce à un projet pilote de poste national de coordination de la préservation numérique. (Responsabilité : ABRC)
2. Améliorer la découverte et le suivi du contenu canadien
- Participer à OpenAIRE pour le suivi des résultats de recherche financés par les trois organismes canadiens, en vue d’une couverture complète des dépôts institutionnels canadiens dans le portail de recherche canadien en fonction d’une conformité accrue des dépôts avec le profil de métadonnées OpenAIRE. (Responsabilité : ABRC)
- Faire progresser l’adoption des identifiants pérennes (IDP) au Canada par le biais d’une stratégie nationale comprenant une croissance soutenue des consortiums canadiens (ORCID-CA et DataCite Canada). (Responsabilité : CCCPID/RCDR avec le soutien d’Alliance et de l’ABRC)
- Explorer et favoriser l’interconnexion des résultats de la recherche dans l’écosystème canadien (par exemple entre les articles et leurs données). (Co-responsabilité : ABRC et RCDR avec l’Alliance et Coalition Publica)
- Sous la direction de l’ANCLA, collaborer à l'élaboration d'une plateforme ouverte pour une terminologie respectueuse. (Responsabilité : ANCLA avec le soutien de l’ABRC et du RCDR)
3. Financer les plateformes, les infrastructures, et les services internationaux de recherche de savoir libre
- Participer à SCOSS, SCOAP³ et à d’autres initiatives internationales afin d’assurer un soutien rationnel et facultatif du Canada à certaines infrastructures ouvertes clés pour le savoir libre. (Responsabilité : SCOSS et ABRC-RCDR, SCOAP³ et RCDR)
- Donner la priorité aux accords de libre accès avec les éditeurs internationaux qui reflètent l’investissement public dans des modèles économiques équitables et durables. (Responsabilité : RCDR)
- Dans la mesure du possible, réorienter les économies réalisées des accords d’abonnement traditionnels avec les éditeurs internationaux vers les petits éditeurs, les éditeurs canadiens et les infrastructures ou services ouverts qui font progresser le libre accès. (Responsabilité : RCDR)
4. Influencer l’évolution des politiques au Canada
- Défendre les politiques du savoir libre et des investissements accrus et coordonnés au Canada. (Co-responsabilité : ABRC, RCDR)
- Faire pression pour le maintien d'une politique équilibrée en matière de droit d'auteur et de maintien des droits d'auteur (y compris en négociant pour soutenir le maintien des droits d'auteur dans les accords de licence). (Responsabilité : ABRC)
- Tirer parti des travaux du groupe de travail du Traité de Marrakech pour accroître l’accessibilité de l’édition et des ressources accessibles et leurs utilisations dans l'ensemble de l'écosystème. (Responsabilité : ABRC)
- Explorer le lobbying collectif en faveur d'une obligation législative de dépôt des résultats de la recherche financée par des fonds publics dans des référentiels ouverts. (Responsabilité : ABRC)
- Défendre l’extension de la numérisation des contenus patrimoniaux avec d'autres parties prenantes du secteur « GLAM » (galeries, bibliothèques, archives et musées). (Responsabilité : RCDR pour la CNPC avec l’ABRC)
- Sensibiliser les décideurs canadiens aux tendances internationales en matière de réforme de l’évaluation de la recherche, y compris aux limites du système actuel. (Responsabilité : ABRC)
5. Soutien à l’innovation
- Promouvoir de nouvelles formes d’édition savante (p. ex., les prépublications, l’examen ouvert par les pairs, les formats d’édition alternatifs). (Responsabilité : ABRC)
- Adopter de nouvelles fonctionnalités de science ouverte dans le contexte des infrastructures et des services canadiens (p. ex., l’initiative Notify de la COAR - relier les ressources connexes dans l’ensemble de l’écosystème canadien). (Responsabilité : ABRC, avec Coalition Publica)
- Dialoguer avec les communautés locales et disciplinaires ainsi qu’avec les bailleurs de fonds et autres acteurs du milieu universitaire pour aider à faire progresser et soutenir l’adoption de pratiques de science ouverte. (Co-responsabilité : ABRC, RCDR)
- Transformer l’infrastructure de recherche Canadiana du RCDR pour adopter des normes ouvertes et un développement dirigé par la communauté. (Responsabilité : RCDR)
- Explorer les implications des systèmes d'intelligence artificielle et de l'informatique quantique sur l'avenir du paysage scientifique ouvert. (Responsabilité : ABRC)
¹Dans le contexte de l'ABRC, ce document remplace la Feuille de route de l’ABRC sur la communication savante (2017).
²Le concept du savoir libre également appelé la recherche libre, le savoir libre ou la science ouverte se concentre sur les approches inclusives de la production, de la conservation, de la diffusion et de l'évaluation des résultats de la recherche et de l'enseignement, sur la manière dont les individus sont récompensés pour cela et sur la manière dont les universités peuvent ainsi apporter une contribution précieuse à la société. (University College of London). Pour les besoins de ce document, nous utiliserons le terme savoir libre, bien que le terme science ouverte soit également largement utilisé.
³Dans le cadre de l'ABRC, ce document remplace la Feuille de route de l’ABRC sur la communication savante (2017).